« On peut gouverner de loin, mais on n’administre bien que de près ». Il s’agit d’une citation de Napoléon Bonaparte, à laquelle Odilon Barrot déplorait qu’ « on appelle décentralisation le simple transfert d’une partie des attributions du ministre au préfet. L’action centrale n'en est diminuée de rien (...) C’est le même marteau qui frappe ; seulement on a raccourci le manche ». Si au départ le principe de la centralisation était un principe fondamental qui dominait toute l’organisation administrative, il n’a pas empêché d’admettre au XIXe siècle que l’Etat français a tout à y gagner à une déconcentration.
Centralisation, décentralisation et déconcentration sont des notions étroitement liées. Si l’Etat unitaire français se caractérise par l’existence d’un seul pouvoir politique, détenu au niveau national, exerçant la souveraineté, et dont les décisions s’appliquent sur l’ensemble du territoire national, l’Etat unitaire est aujourd'hui à la fois déconcentré et décentralisé (loi ATR du 6 février 1992). L’Etat unitaire est concentré au sens où une grande majorité de décisions est décidée au niveau central à Paris. Il est décentralisé au sens où il existe au niveau local des autorités administratives distinctes de l’Etat telles que les régions ou les départements. Il est déconcentré car il existe au niveau local des représentants de l’Etat tels que les préfets, les maires ou les recteurs. La déconcentration consiste à donner compétence pour prendre telle ou telle décision à des organes qui exercent leurs fonctions dans une circonscription déterminée et qui demeurent soumis à l’autorité hiérarchique des autorités centrales. L’objectif est en effet de réduire les lenteurs et lourdeurs administratives liées à l’obligation, dans tout système centralisé, d’attendre la décision de l’échelon suprême. Les services déconcentrés sont ainsi les services de l’Etat qui assurent, sur le plan local, des décisions prises par l’administration centrale et qui gèrent les services de l’Etat au niveau local. Il s’agit de la région et du département. Le préfet, qu’il soit de la région ou du département, est devenu un acteur central de la déconcentration. Ses prérogatives se sont consolidées peu à peu. En atteste le fait que les services déconcentrés sont généralement placés sous l’autorité d’un préfet. Aménagement de la centralisation, la déconcentration se présente comme un moyen de remédier à ces défauts. Surtout, les services déconcentrés sont au plus proche des administrés pour répondre à leurs besoins. Les services déconcentrés se doivent donc d’être efficients, c’est-à-dire d’obtenir de bonnes performances dans leurs missions. Il est ainsi possible de se demander comment est organisée l’efficience des services déconcentrés de l’Etat en France. Des principes et des garanties encadrent la déconcentration (I). Grâce à l’encadrement juridique des préfets, les services déconcentrés sont efficients (II).
I. Les principes et les garanties de la politique de la déconcentration
La déconcentration est devenue davantage efficiente grâce à un effort de rationalisation, opéré ces dernières années (A). Elle est assurée par un contrôle des organismes ainsi que le contrôle du préfet de région sur les services déconcentrés (B).
A. Des réformes continues pour rationaliser le mouvement de déconcentration
● Historiquement, les préfets avaient au départ moins de pouvoir qu'aujourd'hui. - La loi du 28 pluviôse an VIII conférait aux préfets une simple compétence générale au niveau de leur département, alors que les ministres gardaient la plupart des pouvoirs de décision.
- En 1852 et 1861, Napoléon III sous le Second Empire souhaitait réformer la décentralisation. En réalité, l’exécutif avait à cette époque opté pour une déconcentration comme le souligne Léon Aucoc à qui l’on doit ce néologisme. Les mesures prises permirent aux préfets d’affirmer leur prééminence sur les services administratifs de leurs circonscriptions. Ils reçurent le pouvoir de nomination de nombreux fonctionnaires. Le problème de la concentration n’était pour autant pas résolu, car la pratique a tendu à freiner nettement les transferts du pouvoir.
- Des décrets-lois de 1926 et le Gouvernement de Vichy reprirent la politique du Second Empire, en souhaitant notamment mettre un terme aux libertés des collectivités locales.
● Les réformes entreprises sous la Ve République ont eu pour objet de consolider la déconcentration au profit du préfet.
- Des décrets de 1964 ont renforcé les pouvoirs du préfet à l’égard des services de l’Etat, en précisant qu’il les « anime et coordonne ». Là encore, la pratique a montré la difficulté d’instaurer une réelle déconcentration, centralisée entre les mains du préfet.
- En raison de la loi du 2 mars 1982 sur la décentralisation confiant aux élus l’exécutif des départements des régions, deux décrets de 1982
- l’un relatif aux pouvoirs du préfet et à l’action des services et organismes publics de l’Etat dans les départements, et un autre relatif aux pouvoirs des préfets de région
- ont redéfini les attributions du préfet. Il « dirige » les services. Ces décrets ont affirmé parallèlement l’unité de la représentation de l’Etat, en centralisant au niveau des services déconcentrés les pouvoirs au profit du préfet, préfet qui devient l’interlocuteur unique des élus locaux. - La loi du 6 février 1992 ATR a inversé la règle de répartition des compétences entre les administrations centrales et les services déconcentrés. Depuis, les services déconcentrés ont la charge d’appliquer au plan local les politiques conçues au niveau central. De cette loi provient le principe de subsidiarité. - Il en résulte par le décret du 15 janvier 1997 une certaine redistribution des pouvoirs. Le préfet a le principe de compétence de prendre l’ensemble des décisions administratives individuelles entrant dans le champ de compétence des administrations civiles de l’Etat, à l’exception de celles concernant les agents publics d’après la circulaire du 7 mars 1997.
Le décret du 7 mai 2015 portant charte de la déconcentration a réaffirmé la nécessité pour les administrations centrales d’adapter leurs modes de fonctionnement aux nouveaux enjeux de la déconcentration. Ne sont confiées aux administrations centrales que « les seules missions qui présentent un caractère national ou dont l’exécution, en vertu de la loi ne peut être déléguée à un échelon territorial ».
● Depuis le décret du 7 mai 2015 portant charte de la déconcentration, la déconcentration connaît pour la première fois une définition juridique. L’article 1 dispose que « la déconcentration consiste à confier aux échelons territoriaux des administrations civiles de l’Etat le pouvoir et la capacité d’initiative pour animer, coordonner et mettre en oeuvre les politiques publiques définies au niveau national et européen, dans un objectif d’efficience, de modernisation, de simplification, d’équité des territoires et de proximité avec les usagers et les acteurs locaux ». - S’il faut noter l’ajout du volet européen dans la déconcentration, il reste tout de même que ce sera l’échelon déconcentré qui mettra en œuvre les politiques publiques. - La rationalisation de la déconcentration se traduit par la plus grande marge de manœuvre laissée aux collectivités. En effet, il paraissait difficile de garantir la parfaite égalité des territoires. Le décret insiste plutôt sur l’équité des territoires, notion plus souple à mettre en œuvre.
● Cependant, la limite de la rationalisation, prévue par la charte de la déconcentration de 2015, réside dans l’absence d’exigence de performance et de proximité avec les usagers et les acteurs locaux. L’appareil d’Etat reste centré sur lui-même, il ne rend pas compte aux administrés.
● La politique de déconcentration, pour être réussie, doit remplir trois caractéristiques.
- Premièrement, elle doit porter sur des matières importantes. Pour cela, il doit être mis en œuvre le principe de subsidiarité. Il consiste à considérer que les autorités déconcentrés sont compétentes de droit commun et que l’échelon central n’exerce que des pouvoirs d’attribution. La subsidiarité résulte de l’article 1, 2 et 8 du décret du 7 mai 2015. La compétence de principe revient ainsiàl’échelon déconcentré et la compétence d’attribution à l’Etat central.
- Deuxièmement, le transfert de pouvoir doit s’accompagner d’un transfert de moyens. L’échelon déconcentré doit être doté d’un personnel en nombre et en qualité. - Enfin, la déconcentration de la préparation et du contrôle des décisions doit éviter la remontée des dossiers auprès des autorités centrales soit pour consulter tel ou tel organisme national, soit pour vérifier la régularité voire l’opportunité des actes accomplis par les autorités déconcentrés
Dans un souci d’efficacité, les pouvoirs publics ont réorganisé certains de ses services déconcentrés. - La RGPP (Révision générale des politiques publiques) de 2007 a réorganisé les services des départements, en cherchant à y mettre de l’ordre. D’une part, les directions des départements ont pu faire l’objet d’une fusion simple, c’est-à-dire que deux services ont été mis ensemble. Par exemple, la DDE et la DDAF ont été regroupées dans la DDEE. D’autre part, elles ont pu faire l’objet de fusion composite, c’est-à-dire la création de directions interministérielles. Ces services répondent ainsi à plusieurs ministères centraux. Ce sont des recompositions de directions, pas de nouvelles directions. Par exemple, la DDCS et la DDPP peuvent fusionner en DDCSPP. - La RGPP de 2007 a par ailleurs rationalisé et réduit le nombre de comités. 4 directions rassemblent d’autres directions, il s’agit de la DRIHL, la DRIEA, la DRIEE et la DRIAAF.
Si des réformes ont rationalisé la déconcentration, encore faut-il que les autorités gouvernementales s’assurent que les services déconcentrés mettent bien en œuvre leurs politiques publiques.
B. Le contrôle exercé par des organismes et par le préfet de région sur les services déconcentrés
● Deux systèmes méritent d’être mentionnés. Ils garantissent la bonne application des principes de la déconcentration.
● Premièrement, le système de la conférence nationale de l’administration territoriale de l’Etat (CNATE) a pour but de réunir et de faire dialoguer les administrations centrales et les chefs de services déconcentrés, notamment en cas de problèmes à gérer. La CNATE se compose des préfets de région, des secrétaires généraux et directeurs des ministères, d’un recteur d’académie, d’un directeur de la DRFiP, d’un directeur de l’ARS et de 8 représentants du Premier ministre et ministres. La CNATE a été codifiée à l’article 17 et 18 du décret du 7 mai 2015.
● Deuxièmement, le système des études et des fiches d’impact est utilisé dès lors qu’un projet de lois ou un décret porte sur l’organisation de l’administration de l’Etat stricto sensu. Les études ont pour objectif de déterminer les effets des textes juridiques. Les fiches d’impact ont quant à elles pour but d’identifier les services concernés par les textes juridiques, elles étudient les coûts et bénéfices des réformes. Les études et les fiches d’impact sont mentionnées à l’article 8 du décret du 7 mai 2015.
Situé au-dessus de lui hiérarchiquement, le préfet de région dispose de pouvoirs qui le distingue du préfet de département. Il est garant de l’efficience de la déconcentration dans la région. Dans une certaine mesure, il exerce un contrôle sur le département. - Le préfet de région a plusieurs missions. Il doit animer et coordonner les politiques publiques ; mettre en œuvre les politiques nationales et de l’UE ; conduire les actions de modernisations des services déconcentrés ; définir le cadre stratégique de la politique immobilière, etc.
- Le préfet de région est à la tête des services civils déconcentrés. On compte entre 8 et 10 directions selon l’organisation des régions, depuis le Décret 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets et à l’organisation et l’action des services de l’Etat dans les régions et les départements, et mise en place à partir de 2009 par la RGPP. - Échelon de programmation et de répartition des crédits d’Etat, la région est aussi l’échelon de contractualisation des programmes pluriannuels entre l’Etat et les collectivités territoriales. Le décret 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets et à l’organisation et l’action des services de l’Etat dans les régions et les départements indique les compétences du préfet sur ces programmes.
● Le préfet est une entité qui contrôle et est contrôlée. En effet, l'entité contrôlée reste a priori le premier responsable de ses activités. Ceci contribue à renforcer l’efficience des services contrôlés, les préfets ne peuvent pas agir n’importe comment.
- Dès lors, il peut être engagée la responsabilité de ces pouvoirs publics et in fine la responsabilité de l’Etat pour faute simple, si l’activité de contrôle technique ne présente pas de difficulté particulière. Par exemple, concernant l’exercice du contrôle de légalité sur les actes d’une collectivité territoriale par le préfet (CE, 6 octobre 2000, Ministre de l’intérieur c/ commune de Saint-Florent).
- La faute lourde peut également être retenue. Par exemple, lorsque le préfet n’utilise pas son pouvoir de substitution à l’égard d’une collectivité territoriale n’ayant pas exercé une décision de justice passée en force de chose jugée (CE, 4 novembre 2005, Société fermière de Campoloro).
- Une faute personnelle commise dans l’exercice de ses fonctions peut être retenue. Par exemple, lorsqu’un préfet avait dénoncé à un procureur une personne pour une infraction à la police des chemins de fer, alors que le préfet avait délivré volontairement une carte d’invalidité à ladite personne sans l’informer qu’elle n’y avait pas droit (TC, 14 décembre 1925, Navarro).
- Une faute personnelle après commission d’une infraction pénale peut être retenue. Par exemple, lorsqu’un préfet falsifie un plan d’occupation des sols pour la délivrance d’un permis de construire (TC, 19 octobre 1998, Préfet de Tarn c/ Cour d’appel de Toulouse).
- La responsabilité sans faute du fait du refus du concours du préfet d’exécuter une décision passée en chose jugée peut être recherchée. Par exemple, lorsque le préfet refuse d’utiliser ses pouvoirs pour assurer la pleine exécution d’une décision de justice qui a condamné une collectivité territoriale au paiement d’une somme d’argent (CE sect, 18 novembre 2005, Société fermière Campoloro).
● Le préfet de région exerce une compétence générale et une compétence réservée.
- D’une part, le préfet de région a une compétence générale pour la garantie de la cohérence de l’action de l’Etat dans larégion àl’égard des collectivités régionales. A ce titre, il exécute et pilote les politiques publiques ainsi que les politiques communautaires de l’UE. Concrètement, il définit les modalités d’applications sur sa circonscription régionale. Pour cela, le projet d’action stratégique de l’Etat (PASE), constamment révisé, lui sert de guide.
- D’autre part, le préfet de région a des compétences réservées. Il s’occupe de la défense de la région. Ce peut être la défense civile, c’est-à-dire tout ce qui est de la mise en sécurité de la population. Ce peut être la défense économique, c’est-à-dire lutter contre l’espionnage économique ou les détournements. Le préfet de région exerce ses compétences réservées avec deux missions. Uno, il est responsable des mesures de défense non militaire. Il dirige à ce titre l’action d’autres préfets, notamment en matière de prévention et de préparation des actions défensives. Concrètement, le préfet de région déclenche le dispositif d'organisation régionale de secours (ORSEC). Secundo, le préfet de région est compétent en matière de sécurité intérieure. A cette fin, il dispose de compétences en matière d’ordre public. Le préfet de région intervient dès que des troubles s’étendent sur deux départements. A ce titre, il est conseillé par un officier général et assisté d’un préfet délégué à la sécurité et à la défense.
● Si les deux préfets sont en étroite collaboration, à certains égards, celui de région exerce tout de même une certaine subordination sur le préfet de département. Dès lors que le préfet de région a exercé sa compétence générale, le préfet de département va concrètement mobiliser les services départementaux pour appliquer les mesures régionales.
- D’une part, le préfet de région exerce sa subordination par son pouvoir d’instruction. Il diffuse ses instructions au préfet de département.
- D’autre part, il exerce un pouvoir d’évocation. Il peut attraire à lui certaines compétences, c’est-à-dire qu’il exerce sur certains sujets les pouvoirs du préfet de département. Toutefois, trois limites existent au pouvoir d’évocation. D’abord, il ne peut être exercé qu’à des fins de coordination régionale. Un intérêt régional doit être en jeu et doit concerner au moins deux départements. Ensuite, ce pouvoir d’évocation est limité dans le temps, de 1 à 3 ans maximum. Enfin, ce pouvoir d’évocation est un pouvoir de substitution ex ante, c’est-à-dire qu’il ne peut s’exercer que sur une matière préalablement définie. Cela signifie qu’a contrario, ce pouvoir n’est pas une instance de recours pour le préfet de département, seul le préfet de région choisit s’il se substitue ou non.
Des principes et des garanties permettent la déconcentration. L’efficience des services déconcentrés s’explique par le contrôle exercé sur les préfets par des organismes, et sur le contrôle qu’exerce le préfet de région sur celui du département. Pour poursuivre leurs missions, les préfets disposent d’un certain encadrement juridique ainsi que de soutien humain pour les appuyer dans leur quotidien.
II. L’encadrement juridique des missions préfectorales, garant d’une déconcentration efficiente
La déconcentration peut être efficiente grâce à la part d’autonomie dont dispose le préfet de département (A). Préfets de région et de départements disposent d’organes de soutien pour appuyer leurs missions au quotidien (B).
A. L’autonomie du préfet de département par l’octroi d’attributions spécifiques
● Les préfets de région et de département ont quelques attributions comparables.
- Les deux sont représentants du Gouvernement.
- Les deux sont soumis aux injonctions du Gouvernement. Le principe hiérarchique s’exprime dans ce qu’on appelle sa phase descendante.
- Les deux exercent un principe hiérarchique en sa phase ascendante. L’ensemble de leurs fonctionnaires doivent passer par toute la chaîne hiérarchique au-dessus de lui, jusqu’à atteindre le préfet. Le fonctionnaire écrira au N+1, lequel fera de même et ainsi de suite.
- Les deux recourent fréquemment à des délégations de compétence et des délégations de signature.
- Les deux disposent d’une compétence en matière de police administrative.
- Dans le cadre de la déconcentration, ils concluent tous les engagements de la circonscription régionale.
- Dans le cadre de la décentralisation, ils contrôlent les actes administratifs de la collectivité territoriale régionale.
● L’on voit bien que ces attributions communes sont minimes. Le gros des attributions reste spécifiques à chacun des préfets. Voyons à présent ceux du préfet de département.
● Le préfet de département dispose lui-aussi de pouvoirs qui le distingue du préfet de région. Il est le dépositaire de l’autorité de l’Etat dans le département, et le représentant direct du Premier et de chacun des ministères.
- D’une part, le préfet de département assure la représentation de l’Etat dans le département.
* Uno, il a une fonction politique. Il représente l’Etat lors de cérémonies officielles, en occupant le premier rang protocolaire. Souvent, c’est lui qui commencera le discours. La fonction politique se concrétise aussi par son rôle en tant que relais d’informations. Il est une source d’information, en quelque sorte la grande oreille du Gouvernement. Il explique la politique gouvernementale, fait remonter les notes sur le ressenti des administrés, leurs critiques, etc.
* Secundo, le préfet de département a un rôle de représentant juridique. A ce titre, ila pour mission d’exécuter les lois et règlements dans le département. Concrètement, il signe les actes engageant l’Etat, le représente devant lajustice, et exerce un contrôle de légalité d’un certain nombre d’actes administratifs, notamment des actes des collectivités territoriales. Une loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a dégagé quatre secteurs soumisau contrôle de légalité : il s’agit de la commande publique, de l’urbanisme, de l’environnement, et de l’intercommunalité. Toutefois, cette fonction de représentant juridique est à relativiser, car le préfet de département ne dispose que de peu de personnel. Aussi, pour des raisons politiciennes, le préfet de département limite son contrôle de légalité pour donner l’impression aux collectivités territoriales qu’elles ont une grande marge de manœuvre. Au contraire, il va chercher des solutionsàl’amiable. Partant, le préfet n’entérine pas les objectifs de la politique de décentralisation.
* Tertio, le préfet de département a une mission de police de préfet de département, contrairement au préfet de région qui n’en a pas. Il est le responsable de l’ordre public dans les communes, à l’exception de Paris où ce sera le Préfet de police qui concentre tous les pouvoirs du préfet de département. De plus, il a autorité sur les services de gendarmerie, et peut demander en cas de grave trouble à l’ordre public l’appui des forces armées. Par ailleurs, le préfet de département dispose d’une compétence en matière de police spéciale, par exemple sur les délits de boisson. Le préfet de département exerce une tutelle sur la police municipale et sur les collectivités territoriales si ces dernières sont suspendues ou démises. Enfin, il dispose des pouvoirs en matière de sécurité civile et de coordination des services de secours.
- D’autre part, le préfet de département assure des fonctions et des tâches en tant que délégué du Gouvernement. En tant que représentant du Premier ministre et de chacun des ministres, le préfet de département coordonne les services implantés dans le département. Le principe est celui de l’autorité classique. L’autorité fonctionnelle est l’exception.
* Uno, il veille à l’organisation des services déconcentrés. En effet, ces services ne doivent pas être laissés à l’entière discrétion du département. Un Décret 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets et à l’organisation et l’action des services de l’Etat dans les régions et les départements donne compétence au préfet de département pour arrêter l’organisation fonctionnelle et territoriale des services, conformément aux orientations des ministres. La proposition d’organisation doit être d’abord présentée au CAR, puis recevoir l’accord du préfet de région.
* Secundo, le préfet de département a autorité sur ces services déconcentrés. Soit, il exerce une autorité dite classique, c’est-à-dire qu’il est la seule autorité hiérarchique. Dans ce cadre de figure, le préfet de département a à la fois une autorité classique (organisation du service) et une autorité fonctionnelle (définition des missions et moyens du service). Soit, il n’exerce qu’une autorité fonctionnelle, c’est-à-dire qu’il n’est pas le seul à exercer son autorité sur son service. Il est en effet en concours avec un ministre ou ministère. Dans ce cas, il n’exerce pas d’autorité classique.
Préfets de région et de départements ont un encadrement juridique pour mener à bien leurs missions. Ceux-ci disposent également de soutien humain.
B. Les organes de soutien aux préfets de région et aux préfets de départements
● Afin de mener ses missions, le préfet de région est assisté par des organes. Ce sont des auxiliaires qui vont le seconder au plus près. Deux organes doivent être mentionnés.
● Premièrement, le Secrétaire général pour les affaires régionales (SGAR) est placé sous l’autorité du préfet de région, pour lui apporter son concours dans son rôle de représentant de l’Etat. Le SGAR s’appuie sur une équipe interministérielle de chargés de mission et de collaborateurs issus d’horizons professionnels très divers, tels que le numérique ou la recherche. Le SGAR est chargé de coordonner la politique de l’Etat en matière de développement économique et d’aménagement du territoire ainsi que les relations entre l’Etat et le conseil régional. Il est notamment chargé de la négociation du plan Etat-région. De plus, il s’occupe d’une grande partie de la gestion des fonds européens sur le territoire régional, lorsque les régions n’ont pas obtenu une qualité d’autorité de gestion. - Le SGAR reçoit des directives de l’Etat central, et les met en œuvre par un travail dit interministériel. Les travaux du SGAR sont consignés dans le projet d’action stratégique de l’Etat. Son secrétaire général dispose en général de la délégation de signature du préfet en cas d’empêchement. Aussi, le SGAR assure l’intérim du préfet de région.
● Deuxièmement, le Comité de l’administration régionale (CAR) constitue le conseil d’administration de l’Etat en région. Le CAR est présidé par le préfet de région. L’organisation régionale de l’administration de la région a pour effet de renforcer les pouvoirs du préfet. Le CAR réunit tous les mois les préfets de départements, les directeurs des services régionaux tels que la DIRECCTE ou la DRAC).
- Le CAR exerce d’importantes fonctions consultatives. Elles s’exercent pour la préparation des plans et de consultation des régions ; pour les programmes nationaux et communautaires ; pour les conditions d’organisation et de fonctionnement des services déconcentrés ; ainsi que la bonne utilisation des moyens par les services déconcentrés.
- Concrètement, sur le terrain opérationnel, le CAR doit être consulté par le SGAR pour la mise en œuvre du PASE. Aussi, le CAR doit être obligatoirement consulté quant aux moyens nécessaires pour la mise en œuvre de la politique régionale, notamment pour l’ouverture des crédits.
- Un livre blanc peut être émis par le CAR.
● Afin de mener ses missions, le préfet de département est lui-aussi assisté par des organes. Il s’agit de l'État-major du préfet, des services de la préfecture, et des organes consultatifs.
● Premièrement, l'État-major du préfet du département se décline en deux parties.
- D’une part, l'État-major de proximité constitue le cabinet du préfet. Son directeur de cabinet est le sous-préfet. Ce dernier est chargé de la communication du préfet, de sa représentation dans les manifestations officielles, du règlement des questions sécuritaires, etc.
- D’autre part, l'État-major comprend un bureau de cabinet. Deux à trois fonctionnaires secondent le directeur de cabinet.
- A côté de l’Etat-major, il faut noter la présence d’un collège du chef des services. Ce dernier regroupe l’ensemble des chefs de services. Présidé par le préfet de département, ce collège sert de club de réflexion sur les moyens de mettre en œuvre les politiques publiques.
● Deuxièmement, le préfet de département est secondé par les services de préfecture qui se déclinent en deux branches.
- D’une part, le secrétariat général de préfecture est composé d’un secrétaire général de préfecture. Il est un sous-préfet, sauf dans de rares cas. Il est ce qu’on pourrait appeler l’âme vive de la mémoire de la préfecture, en ce sens qu’il reste en moyenne 6 à 10 ans, là où le préfet de département reste 3 à 5 ans sur un poste. Il assure l’intérim du préfet de département en cas d’empêchement. De plus, dans les grandes préfectures, ce secrétaire général est secondé par un secrétaire adjoint.
- D’autre part, le secrétariat général à la mainmise sur les services de la préfecture. Ceux-ci secondent le préfet dans ses missions en tant que représentant de l’Etat. Concrètement, les services agissent dans la direction de la réglementation, des libertés publiques et des relations avec les collectivités locales. Aussi, certains services représentent la fonction gouvernementale de la préfecture. Il s’agit par exemple de la direction de l’Etat regroupant deux directions dans les départements de plus de 800 habitants. Une direction de l’administration générale s’ajoute (3 directions donc) quand il y a plus de 1 800 000 habitants.
- Enfin, la consultation des comités consultatifs peut être soit obligatoire, soit
facultative. Le préfet n’étant pas une personne omnisciente, il dispose d’une
administration consultative. Les comités consultatifs constituent la cheville ouvrière
de la mise en œuvre du terrain des politiques publiques